• Les Musées, les agents, la Collectivité, les élus... la vie ordinaire !!La fièvre « Absolument dé-bor-dée » étouffée (bravo la Bureautière!), voilà l'animateur de ce blog de retour pour évoquer quelques aspects inédits, vus de l'extérieur, des mécanismes de décision de la Fonction publique et des assemblées de z'élus de la République. Pour reprendre la main, quelques mots sur l'attribution des subventions à des associations et autres structures, une des activités habituelles pour laquelle la qualité d'un projet est égale à l'activisme lobbyiste de z'élus locaux.

    En règle générale, le demandeur dépose un dossier dans lequel sont notés les objectifs de l'opération, le calendrier de réalisation et le budget. Ces informations sont élémentaires, rarement audacieuses dans leur formulation sauf celles concernant la partie consacrée au descriptif du projet. Également, très important à savoir, le demandeur doit apporter une partie du financement, de mémoire 16% environ.

    Or, le hasard faisant bien les choses, les demandeurs de subvention ont souvent les numéros de téléphone des z'élus locaux. Et ces derniers n'oublient jamais la notion de clientélisme, pardon d'implication dans leur territoire d'élection régulièrement privilégiée aux dépens de celle de la qualité et de l'intérêt culturels du projet. Ces deux derniers concepts font surtout référence à vous à qui en général ces projets soutenus par la Collectivité doivent bénéficier directement ou indirectement.

    Un exemple précis ? L'attribution d'une subvention à une association qui souhaitait mettre sur pied un échange culturel entre son territoire d'origine et un pays étranger.

    Caractéristiques du dossier :

    • Autofinancement apporté : 0 €

    • Calendrier de réalisation : « on sait pas, dès que l'argent est donné ! »

    • Demande : 4800 €

    En quoi consiste le projet culturel du demandeur ? Partir à l'étranger pour « promouvoir l'image du territoire ». Cette promotion sera assurée lors de trois conférences matinales, d'une heure chacune, en pleine semaine dans une zone rurale à la densité n'excédant pas 30 habitants par km². Pour cela, le demandeur envisage de partir au moins deux semaines. La somme de 4800 € est donc indispensable. Les z'élus en sont convaincus et délibèrent à l'unanimité favorablement.

    Absolument illégale sur le fond, cette délibération sera transmise au contrôle de légalité de la Préfecture qui probablement n'y prêtera pas attention en raison des quantités de paperasses que ce service doit éplucher. Soyons assurés que cette subvention de 4800 € servira en transport, avion et nourriture. Rassurés. Tout comme les z'élus qui profiteront de la bienveillance de cette association et de ses membres.

    Une autre demande de subvention est soumise par une association rassemblant un nombre inconnu d'adhérents, un budget de fonctionnement tout aussi mystérieux, avec une ambition globale floue. Le projet culturel de cette association ? « Organiser la fabrication de cendriers par des personnes handicapées ». En revanche, cette association apporte la garantie que ces objets seront des « outils promotionnels du territoire» commercialisés pour son bénéfice unique. Là encore, nous sommes rassurés. J'oublie un détail, la somme demandée. Celle-ci n'est pas indiquée clairement : entre 50000 et 70000 €. Quant à l'autofinancement, il reste là aussi approximativement équivalent à zéro.

     

    Les demandeurs de subventions manient les subtilités politiques aussi bien que celle liées à la définition du mot bénéfice. Tout comme les z'élus qui brillent dans la notion d'intérêt.


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  • Les Musées, les agents, la Collectivité, les élus... la vie ordinaire !!Imaginez une agent à la production hormonale au moins égale à celle d’un bonobo faisant étal de ses velléités à sa promise poilue, et qui régulièrement vient déployer ses mamelles sur votre bureau avec une envie évidente d’altruisme physique envers vous. Ce petit spectacle médiocre de boîte de nuit de campagne dura quelques jours sans que je n’eus à donner suite à ce type de propositions assimilables à une offre commerciale dans certains quartiers parisiens animés la nuit.

    Dans une équipe, chacun est stigmatisé par une singularité qui le caractérise quelle que soit sa nature. Nabot, idiot, alcoolique, une équipe reste incomplète sans sa nymphomane attitrée. C’était le cas de ce musée où j’officiais et qui était riche d’une agent aux appétences et compétences physiques hors du commun pour lesquelles les agents mâles fantasmaient et salivaient jusqu’à imprégner le sol d’un long sillage de salive à la mode Tex Avery. Occupés à user leurs droits en matière de longue maladie, la moitié des agents de mon équipe m’était encore inconnue quatre mois après mon arrivée dans ce sanctuaire culturel.

    Les agents présents m’avaient prévenu. Selon eux, la revenante irait tapiner en mon bureau ne pouvant résister à l’influence de ses glandes qui lui faisait perdre toute raison approximativement entre le 1er janvier et le 31 décembre.

    A son arrivée, la revenante me salua, enjouée et sincèrement heureuse de son retour. De son propre chef, elle se présenta à moi d’autorité et ferma la porte du bureau que je tenais pourtant perpétuellement ouverte à la demande de la Direction générale qui voulait éviter toute plainte éventuelle de harcèlement moral et physique de la part d’un responsable à l’endroit d’un agent. Ce jour-là, la glorieuse, ignorante de ces nouvelles méthodes de management américaines, brisa la règle et la glace en claquant la porte de mon bureau. Elle s’exposa après que je lui eus demandé ses attentes. Et ouais, dans la Fonction Publique, on est surtout sur « la prise en compte des attentes des agents afin de ne pas faire naître de frustration et entraîner une démobilisation professionnelle trop précoce» (Guide du Parfait Manager DRH dans lequel j’adore le « trop précoce » trahissant une démobilisation inévitable).

    Durant notre échange, mon érotomane me confia qu’elle avait été victime d’une épouvantable chasse aux sorcières à l’arrivée de la nouvelle équipe politique lors des dernières Municipales ce qui l’avait forcée à s’abandonner dans un arrêt longue maladie uniquement pour se protéger à l’image de réfugiés politiques birmans ou iraniens. Ce type de propos est assez commun chez ceux qui adorent se gorger d’importance. C’est aussi une façon peu subtile de souffler au directeur de service que l’agent n’est pas n’importe qui car il dispose d’appuis. De ce doux avertissement, je n’en tins pas compte. Bien au contraire, je lui demandai…. de se mettre au boulot en décrivant illico ses prochaines missions. Erreur. Insensible aux atouts de cette agent qui, systématiquement, faisait dégorger son buste devant mes yeux aussi gênés que flegmatiques, la malheureuse rechuta prétextant une fatigue psychologique rémanente.

    Passons les détails. Un soir, de retour d’un rendez-vous extérieur, les membres de mon équipe présentaient des visages cadavériques. Rapidement, ils louèrent la chance qui accompagne mon existence d’avoir évité un carnage : le fils et le mari de l’agent prompte aux offrandes de sa personne, s’étaient présentés au musée pour effectuer une opération de taxidermie sur modèle vivant. Les deux débilous étaient venus me faire une chirurgie à coups de truelle. Le lendemain, la direction générale fut prévenue de cette petite descente minable de deux loubards de cages d’escalier. Ma hiérarchie, bienveillante, me conseilla de "rédiger en toute hâte un rapport si cela venait à se reproduire pour mieux apprécier la situation d’urgence et envisager une intervention".

    Quelques semaines plus tard, l’agent revînt. Sans se démonter, exactement à l’opposé de la volonté de son fiston et de son régulier qui avaient bien l’intention de le faire avec mon buffet, elle m’avoua qu’une incompréhension regrettable avait été à l’origine de la démarche de ses deux proches.  Elle me promît que cela ne surviendrait plus. Cela n’empêcha pas le précédent maire de venir à ma rencontre pour s’enquérir d’éventuels problèmes entre elle et moi. Les soutiens dont bénéficiait l’agent étaient donc véritables. De cette rencontre spontanée avec l’ancien maire, et sans en craindre quoi que ce soit, je compris assez vite que le mari, bien que légitime, avait régressé au stade de régulier dans la vie de cette dame. Les rumeurs pouvaient donc être justifiées en grande partie.

    En politique, comme dans la fonction publique, il faut savoir se vouer aux bons seins et surtout les louer. A bon prix.

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  • Les Musées, les agents, la Collectivité, les élus... la vie ordinaire !!

    Comment naissent les grands projets culturels en France ? Tout bonnement, grâce au choix d’une assemblée réunie pour l’occasion, le saint Jury de concours.

    Qu’est-ce qu’un jury de concours ? Généralement, une quinzaine de bons hommes (plus rarement des femmes) sont invités à donner une opinion ultime sur des propositions  architecturales que le maître d’ouvrage (la Collectivité) a commandées. Parmi tous les projets en compétition, un seul sera retenu et deviendra un musée, un centre culturel, un théâtre..etc. Mais, avant d’en arriver à cette étape ultime et décisive qui engage parfois les collectivités sur des projets chiffrés à plusieurs dizaines de millions d’euros, le maître d’ouvrage diligente une expertise des différents projets en compétition. Une Commission technique composée d’experts (paysagistes, environnementalistes, ingénieurs,…) est alors rassemblée pour analyser les offres. Sans les noter ou les classer, les experts épluchent, cisaillent, découpent chaque projet en en identifiant les points forts et faibles. Sur la base de ces travaux, la commission technique rédige une synthèse sur laquelle le Jury de concours pourra s’appuyer fortement, voire totalement pour choisir le lauréat du concours. Ce processus peut exiger plusieurs mois et des dizaines de paires d’yeux aguerris à l’exercice. Vient alors le jour du jury de concours réuni pour la seule occasion du choix final et dont les membres n'ont pas encore vu les projets en compétition.

    Ce jury de concours auquel j’ai assisté m’a permis de relativiser, voire d’effacer mes illusions quant à l’objectivité du choix des z’élus et leur engagement sincère pour le bon usage de l’argent public (et aussi quant à l'utilité de mon boulot). Aussi, après des mois d’efforts à se crever les yeux, à s’étriper, à s’arracher les viscères (et celles du voisin à l’occasion), la commission technique rendît ses conclusions pour trois projets dont le montant global était supérieur à plusieurs millions d’euros (bien plus même !). Le grand jour est là, le Jury de concours est réuni. Parmi ces gens siégeant dans ce jury, choisis sur des critères aussi subjectifs que postiches, se trouve notamment un homme que la République a appelé plusieurs fois à Paris.

    Premier moment aussi solennel que poignant, le responsable de projet récite, avec un talent d’orateur égal à celui d’un bigorneau pris de torpeur face à un bavarois en short qui va le piétiner, les conclusions de la commission technique pour chaque projet pendant que les quinze sages docilement posés sur leurs chaises entament leur premier cycle de sommeil. Après près de deux heures de dissertation verbale abrutissante, le jury est invité à se lever pour observer de près les panneaux résumant chaque projet. Inutile d’aller plus loin dans le détail de la situation : tous ces jurés assiéront leurs jugements définitifs sur une image anodine, un simple visuel, une vue d’artiste résumant les projets respectifs. D’ailleurs, aucun n’a pris le soin d’ouvrir le rapport qui se trouvait sur leurs tables.

    Après quinze minutes de déambulation, tout le monde regagne sa place, mettant fin à des conversations axées sur les dimensions du coffre de la dernière Laguna Renault ou encore celles du bas de caisse de la jeune serveuse du resto de midi. Dans un silence de cathédrale uniquement dû aux mécanismes de la digestion, chacun est appelé à livrer son choix en argumentant si l’envie est là (« sinon, pas la peine, c’est pas obligatoire ! » indique le Président du Jury). Vient le tour de Notre Haut Z’élu, jusque-là silencieux, qui fait un sort à l’un des projets, pourtant probablement le meilleur. J’eus la chance d’apercevoir l’argument imparable rédigé sur un bout de feuille blanche par ce personnage pourtant respecté nationalement. Nous avions trimé pendant deux mois pour recevoir, au bout du compte, un uppercut de haute volée intellectuelle honorant notre travail : « Trop ver, j’aime pas ! ». La faute d’orthographe était dans le texte, l’argument pas plus développé que cela. Et voici comment, la collectivité s’engagea sur un projet bancal après avoir écarté probablement le meilleur qui fut présenté par des architectes et vraisemblablement le plus sûr pour le porte-monnaie de tous.

    Peu de temps après, dans un restaurant, j’entendis un enfant de 8 ans répliquer à sa maman qui voulait lui faire avaler des épinards : « Trop sales, j’aime pas ! ». Les z’élus sont de grands enfants.

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  • Les Musées, les agents, la Collectivité, les élus... la vie ordinaire !!Une équipe est l’addition de personnalités souvent différentes, voire uniques, et même carrément très singulières. Et recruter un nouvel agent est un exercice délicat, surtout lorsque le nouveau crie à qui veut l’entendre, que la collectivité a retrouvé le bon chemin depuis qu’il est arrivé. Dieu est donc dorénavant dans un bureau proche du mien. Ne plus prêter attention à ses inepties est un réflexe, à l’instar du tic-tac au début agaçant que produit une comtoise à laquelle on ne prête plus attention au fil des jours.

    Notre messie, ingénieur en techniques de construction, a deux grandes qualités qu’il cultive : l’omniscience et l’omnipotence. Lui-même se qualifie comme un autodidacte et en retire une fierté incommensurable dès qu’il veut briller, soit approximativement tout le temps. Exister à côté d’un élément aussi indispensable à notre humanité est un privilège que je mesure en profitant des paroles que ce dieu vivant de la connerie prodigue avec générosité. Donc, voici quelques citations notées depuis l’arrivée de cette personnalité insolite.

     

    Sérieux

    « Faut pas m’prendre pour un lapin de garenne de six semaines ! »

     

    Obsédé

    « Cette étude importante, c’est le prépuce du projet. »

     

    Philosophe

    « Les années 2000, c’est la starification à outrance où tout le monde veut être star. Moi, mon dicton c’est de vivre heureux, vivre caché » assène-t-il au milieu d’un groupe constitué de 20 personnes qui l’écoutent ou le subissent lors d’un monologue de 10 mn.

     

    Géographe sûr de lui

    « Moi, l’Afrique, je connais. Je vais souvent au Sénégal ! »

     

    Lui-même

    « Dans la culture, moi j’connais, y’a que des homos ! ».


    YMCA

    « Personne me la met. J’suis du bâtiment ! ».

     

    D’autres maximes de cet ingénieur-philosophe en techniques de construction viendront dans les prochaines semaines. Peut-être même dès lundi matin. La joie m’envahit.

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  • Les Musées, les agents, la Collectivité, les élus... la vie ordinaire !!

    Les projets, les beaux projets flamboyants que les z’élus désirent sans avoir le courage, encore moins l’honnêteté, de les défendre face à leurs électeurs, vous en connaissez très probablement. D’ailleurs, la plupart des musées naissent de ces lubies quotidiennes et vaniteuses auxquels ces barons locaux veulent suspendre leurs noms sans jamais se frotter aux vraies gens lors de réunions publiques.

     

    On veut un projet culturel. Alors il faut une équipe. Certainement pas des gens délogés dans les services administratifs de la Collectivité où toutes ces compétences profitent des 35 heures cumulées collectivement sur un mois. Donc, on fait un appel à candidatures car il faut des personnes motivées. De plus en plus souvent, on passe par un cabinet de recrutement aux méthodes américaines, donc crédibles. Dans le cas qui nous intéresse, les z’élus souhaitaient recruter un directeur de projet pour un musée au budget estimé à quelques millions d’euros. Le profil requis était subtilement mais fermement décrit dans un cahier des charges ordinaire pour ce type de poste. On y lisait notamment :

    -         Expérience exigée dans la conduite de projets similaires

    -         Anglais indispensable

    -         Connaissance du fonctionnement des Collectivités

    Assurément, il était inenvisageable que le piston fonctionnât une nouvelle fois. Un tel projet dont toute la France allait entendre parler ne pouvait, cette fois-là, ne pas être conduit par une personnes réellement compétente.

     

    Plusieurs candidats respectaient ces critères. Sans surprise, le lauréat ne fut absolument pas bilingue (il fait même appel à un interprète), n’a jamais entendu parler des Collectivités (à son arrivée il pensait que le mot « délibération » était un journal satirique du vrai quotidien Libération) et bien sûr, avant d’intégrer la prestigieuse FTP, il gérait une centrale de réservations pour Bataves. Quel fut donc l’argument qui permit aux recruteurs américains du Boulevard Saint-Germain de retenir cette candidature évidente : le tutoiement du Président de la Collectivité et d’autres amitiés entretenues pour la circonstance.

     

    Aujourd’hui, ce directeur de projet a toujours une vision très limitée du mot culture en en  retenant que la première syllabe. Pour chaque réunion importante qui nécessite un retour critique, ces critères d’intérêt se quantifient au nombre de filles de moins de 25 ans présentes autour de la table et bien sûr à la qualité des compétences qu’elles possèdent sous leurs pulls. Et surtout, en bon connaisseur des usages politiques et de leurs cabinets, les notes demandées aux collaborateurs sont systématiquement amputées des signatures des vrais auteurs pour ajouter la sienne.

    Le discrédit que ce lauréat opportun porte au projet devient problématique. Autant charismatique qu’un flétan qui fait du vélo, ce directeur de projet, classé 7ème Dan en léchage de pompes et incompétence, parvient dorénavant à se masturber le bulbe devant la réussite de l’équipe qu’il a fallut constituer pour suppléer à son inaction et son incapacité quotidienne à décider. Il résume son ambition en répétant : « Je veux être celui qui a fait sortir le musée de terre ». Un petit conseil de non-ami en dépit de ce que tu penses : par la même occasion, profite pour déterrer ton intelligence et lui faire prendre l’air !

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